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décrypt'art - Page 23

  • Max Wechsler (par Régine)

    1505588488.jpg1405234232.jpgA la fois ascétiques et énigmatiques, délicates et puissantes les oeuvres de Max Wechsler actuellement exposées à la galerie Guislain - Etats d'art nécessitent de s'y arrêter longuement et de les examiner avec attention. A distance elles sont presque monochromes, de près elles révèlent un travail extraordinairement minutieux.

    Grands formats, aux reflets de métal, et petits papiers marouflés, regroupés par deux, trois ou quatre, développent une gamme de noirs et de gris dont il est difficile de dire le véritable médium : pas d'huile, pas d'acrylique, pas de gouache. Les motifs sont des lettres, des fragments de mots indéchiffrables. Or, ces oeuvres ne sont pas peintes mais faites de morceaux de papier imprimé incroyablement travaillés.

    Le matériel de base : des pages imprimées et déchirées, une photocopieuse noir et blanc, des ciseaux, de la colle et du liant. Pour les grandes toiles, souvent divisées en trois parties, Wechsler chiffonne le papier et le colle librement sur la surface préparée de la toile jusqu'à ce que celle-ci soit complètement et densément recouverte (photo de gauche). Le tout est revêtu d'une couche de colle qui devient un élément plastique de l'oeuvre par sa présence dure et transparente qui favorise l'éclosion d'infinies nuances.

    La photocopie permet aussi toutes sortes de manipulations : reproduire les bribes déchirées, les agrandir ou les réduire, varier les contrastes, flouter le contour des lettres pour arriver à une sédimentation d'images, de mémoires diverses.

    La texture fine et soyeuse des petits formats  non recouverts de colle (photo de droite) , est d'une infinie douceur. Les gris impalpables se nuancent de jaune, de vert ou de rose. Deux, parfois trois bandes horizontales, à motif différent, se recouvrent légèrement et occultent sur quelques centimètres le papier sous-jacent, différent de celui du dessus, comme une liasse d'échantillons.

    On n'est pas dans la peinture, mais dans l'écrit. Les caractères sont souvent méconnaissables. Le texte, impossible à déchiffrer, est plongé dans l'obscur. A l'inverse d'Opalka qui exprime l'anéantissement par un lent processus, Max Wechsler malaxe, enfouit lettres et mots, et en rend la signification inaccessible. 

    Veut-il communiquer ainsi son rapport au langage par l'effacement du sens ? Seul l'univers plastique peut en avoir un quand l'écrit n'en porte plus. Enfant d'une famille juive, né à Berlin en 1925, il est arrivé en France à l'âge de 13 ans dans un pays où parler allemand était une menace mortelle. Seule solution : se taire. Cette expérience traumatique façonne probablement son oeuvre.

    La gamme des noirs calcinés et des gris cendrés évoque la disparition dans les flammes et on ne peut s'empêcher de penser qu'il s'agit d'une référence à un monde englouti et aux évènements mortels qui ont marqué sa jeunesse.

    Cette peinture de murmure et de retenu semble signifier que l'excès d'écrit tue le sens. Devant le déferlement actuel de publications Wechsler nous dit peut-être qu'il est temps de faire taire ce barvardage pour entendre ce qui est important.

    Toujours présentées sans cadre, tissées d'innombrables lettres et mots ces oeuvres sont de bien énigmatiques messages qui laissent au bord du vertige.

    Galerie Etats d'Art - 35, rue Guénégaud, 75006-Paris. Tél : 01 53 10 15 75, du mardi au samedi de 11 h à 13 h et de 14 h à 19 h. Jusqu'au 15 avril. Galerie.guislain@wanadoo.fr

  • Philippe Cognée (par Sylvie)

    1128155432.JPGParce que depuis ses débuts j'ai toujours apprécié son travail, je suis allée avec entrain voir la dernière exposition de Philippe Cognée , chez Templon, à Paris.

    Il y a là 36 tableaux du même petit format (70,5x47cm), accrochés bien régulièrement à hauteur des yeux. Des rouges lie-de vin, des noirs et des blancs puissants et des demi-tons somptueux s'y déploient dans une déclinaison de lignes horizontales et verticales. Le thème ? Des carcasses animales, des sacs d'os et de viande suspendus à des crochets. De près, de loin, en gros plans ou en rangs, tel un reportage. Il est vrai que photos et vidéos servent toujours à Cognée de point de départ, quelque soit le sujet. Projettées sur la toile ou le bois, elles sont peintes à l'encaustique  (cire d'abeille et pigments) et recouvertes d'un film plastique qu'il chauffe au fer à repasser puis arrache. Ce qui a fondu devient écrasé, embué, donnant aux éléments figurés un aspect  fragile, plus vivant et plus abstrait à la fois. Matité des zônes arrachées, vitrification  des fonds vierges, la surface - la peau de la peinture ? - vibre autant que l'image. Toutes ces vues sont des plongées dans la matière animale, pas de bordure pour limiter le champ. Gros plans et alignements dans les abattoirs industriels sont autant  de corridors, de perspectives floues dans lesquelles le regard pénètre comme dans les allées d'un jardin. Non sans un certain 66128057.JPGmalaise, quand même.

    D'autres artistes avant lui se sont penchés sur les "écorchés" et les quartiers de boeuf, Rembrandt , Goya, Soutine, ou encore Bacon. Après avoir traité, avec distance et froideur, des foules, des villes, des étalages de supermarché, l'univers de notre quotidien construit et, par le floutage, donné sur le point de disparaitre, Cognée avait dévoilé plus nettement son angoisse du néant dans des séries de crânes humains. Le regard  qu'il porte ici sur la chair, fut-elle animale, m'a donné le sentiment qu'il abordait, de front cette fois, la question essentielle: qui sommes nous ? et, pour l'artiste qu'il est : qu'est-ce que la peinture?

    Pris individuellement, ces tableaux sont d'une très grande beauté plastique. La série, insecable, est presque trop forte. Personnellement je préfère le Cognée plus distant.

    Philpppe Cognée "Carcasses", galerie daniel templon, 4 impasse Beaubourg, 75003. Paris. Du mardi au samedi, de 10h à 19h. Jusqu'au 5 avril. 

  • Georg Baselitz ( par Sylvie )

    912227716.2.jpg Baselitz.

     Cette forme compacte, à gauche, faite de larges taches de couleurs gaies, brouillonnes, au centre de la gigantesque toile blanche, c’est un coup de poing, une tornade emportée dans un mouvement circulaire.  Il est surmonté d’un motif  de lignes noires entrecroisées, bordées de couleurs primaires, droit sorti d’un tableau de Mondrian. Curieux mélange ! Et puis on voit des jambes, à l’envers.

     Le titre de la série le confirme, il s'agit de l’image d'un couple. En penchant la tête - ce qui devrait faire se dresser les cheveux de l'artiste - aucun doute, la scène représente une femme, rose et jaune, nue, peut-être, sur un fond vert , assise sur les genoux d'un homme vêtu de bleu. Chaussés, chapeautés, un peu clownesques, ils évoquent plus la luxure que la tendresse.  Il y a une fulgurance dans les traces de pinceau en tous sens et les traits griffés qui rappelle l’expressionniste abstrait William de Kooning et ses « women »  des années 50.

    Des personnages la tête en bas, peu de peintres se sont faits une marque de fabrique de cette façon de faire. C'est du Baselitz ! Pied de nez au spectateur,  mépris pour la nature humaine ou difficulté graphique à camper debout nos carcasses de bipèdes ? La question peut se poser devant les toiles de cet artiste allemand né en 1938 exposées à  la galerie Thaddaeus Ropac, à Paris.

    Pourquoi le retournement ? C’est une vieille histoire. Baselitz a pris le parti d'inverser ses motifs à la fin des années 60 en réponse à une interrogation sur la représentation du réel et  la pratique picturale. S’ensuit évidemment un double dérangement: dérangement devant cette mauvaise facture, une peinture à toute vitesse d’une représentation grossière; dérangement face à ce quelque chose de reconnu sans l'être exactement, le sujet,  mais vidé de son sens du fait de l’inversion avec pourtant l’effet tragique du miroir. Je rapprocherais volontiers cette oeuvre de celle, intitulée « souvenir de la galerie des Glaces » peinte dans les années 20 par un autre allemand, Otto Dix, expressionniste de la Nouvelle Objectivité : même  représentation cynique d’une société pourrie, même effet miroir.

    Pour ses 70 ans, Baselitz ne se renie pas. Ce motif du couple il l’a déjà traité (d'où le nom de "Remix" de l'exposition). Il lui donne ici une nouvelle résonance. Représentation et abstraction y chahutent de façon d'autant plus troublante que s’ajoute la référence à la  gaîté géométrique de Mondrian, un artiste attaché à l’utopie d’une société future parfaitement équilibrée. Seulement voilà, les jambes  sont suspendues comme de la viande et  la grille noire, tronquée, réduite à l’état de crocs de boucher, figure une croix gammée. Décidément cette génération de peintres allemands a du mal à surmonter son passé.

    Georg Baselitz "Remix", galerie Thaddaeus Ropac, 7 rue Debelleyme, 75003. Paris. Du mardi au samedi de 14 à 19h. Jusqu'au 29 mars 2008. 

     

  • Claudio PARMIGGIANI (par Régine)

    545215866.jpg1522468378.jpgJe me souviens d'avoir éprouvé un énorme choc en voyant pour la première fois des oeuvres de Claudio Parmiggiani. C'était il y a quelques années à Toulon. Elles me faisaient toucher du doigt le lien entre le monde matériel et le monde spirituel. Ce même sentiment me saisit devant l'installation actuellement visible à la galerie Serge le Borgne.

    Comme à son habitude Parmiggiani a investi et exploité entièrement l'espace mis à sa disposition. Un espace très clair composé de deux longues salles en L bordées sur un côté d'une verrière.

    L'installation occupe les deux salles : elle est composée de deux ensembles de casiers en acier borssé, 115 pour l'une (5 en largeur et 23 en longueur), 185 pour l'autre (5 en largeur et 37 en longueur) ouverts sur le dessus et remplis de cendre.

     Rien de plus, mais l'effet de surprise fait vite place à une multitude de sentiments.

     J'ai d'abord été frappée par la beauté que dégage l'extrême simplicité de l'oeuvre, le rapport entre la dureté de l'acier et la douceur sensuelle de la cendre, entre la couleur argent mat du contenant et celle tantôt grise, tantôt dorée, tantôt légèrment jaune du contenu. J'ai dû me retenir pour ne pas toucher et laisser couleur entre mes doigts cette poudre aux couleurs mordorées qui semble être tombée d'un sablier et que les infinies nuances de la lumière module à l'infini. Oh temps suspend ton vol !

    Les liens avec l'art minimal et l'Arte Povera sont bien sûr évidents : prise en compte de l'espace d'exposition, dépouillement, sollicitation du spectateur pour le premier, simplicité du matériau, mise en évidence d'un processus pour le second, mais cette oeuvre nous entraîne aussi vers d'autres chemins et nous inspire des sentiments bien particuliers.

     Il s'agit de crémation - les casiers font inévitablement penser à des urnes funéraires - et ceci est loin d'être neutre. Avec une extrême simplicité, et avec sérénité, Parmiggini suggère la fragilité des êtres et des choses et leur inéluctable dissolution. La phrase de la Bible nous revient en mémoire " Tu es poussière et du retourneras poussière". Nous sommes devant une Vanité des temps modernes.

    Tout le mystère de l'absence est pointé là. Certes les objets auxquels nous étions attachés ont disparu, les êtres aimés sont morts, mais leur souvenir, leur lumière nous habite. Les boîtes contiennent toutes des cendres, mais chaque tas est imperceptiblement différent, comme si l'aura de ce qui a disparu dans les flammes subsistait. Secrète et émouvante vie des choses !

    En nous confrontant à l'ultime métamorphose, cette oeuvre m'inspire le respect. Elle est à la fois matérielle et spirituelle, physique et mentale, et conduit du simple au sublime, de l'élémentaire au métaphysique.

    Je ne saurais mieux que l'artiste exprimer ce que j'ai ressenti : "Je crois qu'une oeuvre ne peut se dire avec les mots. La parole appartient à une langue, l'image à un autre alphabet et la langue de l'image réside dans l'émotion, première impulsion qui enfante l'art."

    Claudio Parmiggiani : "Cenere", Phénix, 2008, Galerie Serge Le Borgne - 108, rue vieille du temple - 75003-Paris. Du mardi au samedi de 10 à 13 h et de 14 h 30 à 19 h jusqu'au 22 mars 2008

     

  • présentation de notre blog

    Nous, Sylvie et Régine, nous intéressons à l'art de notre époque. Ce blog est destiné à vous faire part de nos coups de coeur lors de balades ou de visites dans des galeries essentiellement parisiennes et à essayer de les faire passer avec des mots simples.

    Les commentaires sont les bienvenus, qu'ils soient critiques ou pas. Portes ouvertes aux  questions et aux suggestions.


  • Les transparences de Desgrandchamps(par Sylvie)

    8307e6371151c7e83e2757d4a6c9ea4e.jpgAvis aux amateurs de fantômes: une étrange atmosphère règne dans les tableaux de Marc Desgrandchamps. L'oeil y cherche en vain un nom à mettre sur ces non-lieux et ces non-figures, une situation précise à identifier, une histoire à interpréter. Sont-ce des apparitions ou des disparitions?

    Quoiqu'il en soit, un vrai plaisir est là dans la fraicheur des couleurs où les bleus intenses et les verts dominent; dans la légèreté "aquarellique"du médium huile, particulièrement fluide, fait de pigments dilués. Des formes indéterminées se superposent sans heurts. L' espace est ouvert, on respire. Les images parlent de la vie quotidienne, banale, sous un soleil toujours latent. Des silhouettes humaines, souvent tirées de photos, évoluent dans la nature ou le bâti - la plage, la cité -  entrainant le regard dans leur mouvement comme dans un film. Cà et là des indices comme des bribes de souvenirs précis teintés de mélancolie: une tong, un visage en casquette et lunettes noires..C'est un peu pop.

    La vision frontale de cette jeune personne toute en rondeurs sensuelles (photo), à la démarche alerte, créé une dynamique dans l'univers rigide urbain dont la composition structure le tableau. La transparence du vêtement, en surimpression, donne à sentir tout à la fois sa propre légèreté,  mais aussi l'épaisseur de la chair et la géométrie du paysage dont ils sont traversés, en l'adoucissant. Quel étonnant condensé de vie. L'artiste introduit des "dégoulinures" de peinture qui floutent certains contours. Etres et choses en acquièrent une improbable matérialité comme si notre vision se brouillait.  Selon l'humeur, un malaise peut naître devant ces spectres déliquescents dans un bleu tranchant, hors limite qui rappelle la solitude de certaines peintures surréalistes.

    A voir absolument la vidéo qui accompagne l'exposition, pour mieux comprendre le travail de Desgrandchamps. 

     Marc Desgrandchamps , à la galerie Zürcher, 56 rue Chapon, 75003, Paris. Du mardi au samedi de 12h à19h, jusqu'au 12 mars 2008.

  • Colette Deblé aux Editions des femmes (par Régine)

    79d73372b7d22d55bb1185cf1ebf3b66.jpgCréées en 1973 dans la foulée de 1968 et de la fondation du MLF, les Editions des Femmes, avec la fermeture, quelques années plus tard, de leur librairie de la rue de l'Odéon, avaient disparues de notre paysage quotidien.4f79e3286b440e178c136f08325fe717.jpg

    Quarante ans plus tard, elles réapparaissent avec éclat, non seulement en ouvrant une librairie au 33 rue Jacob, mais aussi, au n° 35 dans un ancien magasin de Kilims, un splendide espace galerie.

    Pour célébrer ces évènements  Antoinette Fouque, la fondatrice, a demandé à l'artiste Colette  Deblé d'illustrer un agenda pour 2008. Le choix de cette artiste ne pouvait être plus judicieux. En effet, depuis une dizaine d'années Colette Deblé propose une lecture inédite de la représentation de la femme dans l'histoire de l'art ; d'une scène peinte, sculptée ou photographiée, elle en isole l'image et se l'approprie en en redessinant le contour au crayon ou à l'encre de Chine et en la colorant d'une gamme délicate de lavis d'encres diluées. Avec l'acuité d'une enthomologiste, elle a l'art de saisir, avec la pointe de son crayon, la spécificité de chacune d'elle. Les quelques 200 lavis qu'elle a exécutés pour cette entreprise sont exposés là et c'est un enchantement.

    Une farandole de femmes aux visages et aux  attitudes d'une infinie variété, et dont les membres tronqués ou les évidemments internes rappellent les statues antiques ou les marionnettes d'Asie, nous communiquent leur vitalité.

    Les bleux, les verts, les rouilles, les jaunes, les pourpres, toute une palette de teintes légères et rompues se fondent les unes dans les autres pour notre plus grand plaisir, par la grâce du lavis. De Duras à Sapho, d'Isadora Duncan à Diane ou de Marie Curie à Sainte Cécile ou Simone de Beauvoir et bien d'autres ces portraits semblent flotter dans un univers semé de taches de couleur comme autant de constellations.

    L'exposition respecte l'organisation de l'agenda : elle commence par les femmes qui illustrent le mois de janvier pour se terminer par celles qui illustrent le mois de décembre.

     C'est ainsi que nous sommes accueillis par une Ste Lucie (photo 1), extraite d'un tableau d'Oldoni ; les couleurs des longs plis mouvants de sa robe semblent évoluer sous nos yeux. Un portrait de Sapho (photo 2) qui porte à sa bouche une flute à la fois présente et absente, puisqu'elle est faite d'une réserve de blanc dans l'harmonie colorée du vêtement et du visage, clot cette galerie de portraits.

    Toutes ces femmes passent sur les pages de l'agenda, évanescentes, rendues parfois à la force de leur personnalité par des citations en bas de pages.

    C'est beau, tonique et réjouissant. 

    Espace galerie des Editions des Femmes - 35 rue Jacob, 75006-Paris du 14 décembre au 15 février, de 11 h à 19 h. du mardi au samedi.

  • ça bouge à la Cité U (par Sylvie)

    Les jardins de la Cité universitaire - dans lesquels peu de parisiens osent, à tort, s'aventurer, les ayant catalogués comme résidence fermée au monde - s'offrent un nouveau visage.

    Appelons sculptures ces 6d297ec2aaed61a818b8c82db0d5f7ea.jpgéléments campés depuis le 13 décembre aux alentours de la Maison Internationale, face à la station du RER. Et amusons nous de ce travail sur la couleur que nous propose  Pierre Surtel et qui se donne à voir différent à chaque pas.

    Cette installation éphémère est composée de  multiples structures verticales de trois à huit mètres de long et de un mètre de large, faites de planchettes de bois espacées de quelques centimètres et dont la face interne est peinte. Ces  paralléllépipèdes ajourés ont chacun une couleur- fluo, rose, jaune, bleue- dont l'ampleur change selon l'angle de vue: avancez et c'est un grand rectangle coloré en cage, bougez encore et ce n'est plus qu'un trait vertical...Un jeu qui rappelle un peu l'art cinétique des années 60.

    C'est assez e736fe5b1b2bfb78e3c2c6fb569c22ae.jpggai de jour au soleil. un peu austère dans le gris car le gigantisme de l'enveloppe de bois prend le pas sur la couleur. En revanche, l'éclairage interieur nocturne donne aux couleurs toute leur intensité au dépend des stuctures qui disparaissent alors dans la profondeur de la nuit.

    Evidemment de telles formes colossales changent totalement la perception de l'architecture des lieux. Pourtant, en matière de monumentalité, elle est bien là, mais dans le vaste espace du jardin, elle finit par se faire ignorer. Comme quoi une perturbation visuelle peut rappeler une réalité oubliée.

    "Claies" , à la Cité Internationale universitaire de Paris, 17 bd jourdan, 75014. Paris Accès libre tlj de 8h à 22h, jusqu'au 20 janvier 2008. Et, du 25/01 au 23/02 à Jussieu.

     

  • Viallat joue la Poste (par Sylvie)

    09c43b01096a96492232e5ae4cd851eb.jpgDu dehors il ne fait pas rêver ce musée de la Poste, face à la gare Montparnasse. Et se voir obligée d'en traverser les salles de collections - préjugées forcément poussiéreuses - pour accéder à l'exposition temporaire, voilà de quoi faire tourner l'humeur au vinaigre.

    Et bien, battons notre coulpe pour cette réaction à fleur de peau, ce fut fort intéressant, un endroi éducatif, présenté de façon attachante, où mener les enfants en cette période de vacances : s'y trouve retracée l'histoire du transport du message écrit. Les attelages, les pataches (bateux fluviaux), les malles-postes, les uniformes, les boites aux lettres, jusqu'aux guichets des années 50 et l'invention du télégraphe par Claude Chappe en 1791 ; celle-ci impressionna si fort Alexandre Dumas qu'il l'introduisit dans Le Comte de Monte-Christo...

    Que vient faire là Claude Viallat, direz-vous? Rendant hommage à l'artiste, le musée de la Poste lui a commandé un timbre émis en juin 2006. La maquette de ce timbre rose vif et vert côtoie ici une vingtaine d'oeuvres à l'acrylique sur sacs postaux : c'est une heureuse initiation au travail de cet artiste nîmois, né en 1936, passionné de tauromachie. Un des fondateurs du groupe Support-Surface à la fin des années 60, il est resté attaché à la remise en cause des matériaux traditionnels de la peinture, jusqu'au support brut, libre, sans chassis.

    Fini le sujet unique centré habituel au timbre poste. Avec Viallat, le motif neutre (haricot, osselet?) et répété qui caractérise son oeuvre devient sur le support-timbre un semis. Dépourvu de la bordure blanche, crantée, traditionnelle, il flotte dans un espace sans limite. Et les couleurs, toniques et subtiles, comme toutes celles de la série d'oeuvres ici présentes, ont un éclat, une douceur, une densité, d'une grande puissance décorative. Leur difusion dans la  matière textile en exalte la sensualité. Le rose profond du timbre est né de son support, une cape de torero!

    Musée de le Poste, 34 bd de Vaugirard, 75015. Paris. 01 42 79 24 24. Du lundi au samedi de 10h à 18h (fermé dimanche et jours fériés). Viallat, jusqu'au 22 février 2008.

  • Kirkeby (par Sylvie)

    b459e9478a660af7ed9fc35c0b20851c.jpgFigure majeure de l'art contemporain scandinave, mais assez méconnu du grand public français, Per Kerkeby est exposé à la Galerie Vidal St Phalle à Paris jusqu'au 22 décembre.

    De grandes toiles presque toutes de format carré (122 x 122 cm) d'un artiste contemplatif et tourmenté, à la formation de géologue. Par ces temps de grisaille propre aux plaisirs casaniers, sa peinture, toute minérale, transmet avec puissance et sensualité un désir de nature dont on aurait tor339bf95ad4bf6521634e80ca26f29e08.jpgt de se priver en attendant le printemps.

    Des couleurs terreuses, des espaces souvent divisés comme un puzzle, de multiples strates donnent corps et énergie aux éléments figurés et font percevoir une sorte d'humus nourricier sans que notre oeil ne voit véritablement ici la forêt, là les champs ou les rochers. Figuratif ou abstrait ? allez savoir.

    Un coup de chapeau à la toile ici reproduite : "sans titre", 2004. Du fond noir sur rouge qui laisse apparaître les veines du support en masonite, s'élèvent en rangs serrés des filaments verticaux, ponctués au pastel gras d'outremer et de véronèse et couronnés de taches étincelantes. Pourrissement, germination, on est au coeur du renouvellement de la vie 

     Galerie Vidal St Phalle - 10 rue du Trésor, 75004 Paris. Du mardi au samedi, de 14h à 19h.