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Bibliophilie contemporaine

  • Edward et Nancy Kienholz (par Sylvie)

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      L 'exposition qui se tient à la galerie Templon, à Paris, prête à réactions vives. Si vous préférez le beau classique ou l'abstrait contemporain , passez votre chemin. Les sculptures du couple d'artistes américains autodidactes Edward ( 1927- 1994)  et Nancy (1943-2019) Kienholz, aujourd'hui disparus, sont toujours un coup de poing dans la bienpensance depuis leur création initiée au début des années 60 par lui et perpétrée avec Nancy à partir de 1972.  Coup de poing d'abord par la technique de l'installation et de l'assemblage - rejoignant ainsi sur notre continent le nouveau réalisme d'Arman et de Tinguely - mais plus encore par une critique féroce de l'Amérique qui leur a valu d'être longtemps boudés par les institutions et tenus à l'écart du mouvement pop de l'époque pour manque de concessions. 

         Considérant la vingtaine d'oeuvres exposées, il est clair que sont déjà perturbateurs les matériaux qui les composent : objets et résidus de récupération, vêtements, ferrailles, vieux meubles, déchets de la culture de consommation auxquels s'ajoutent des nus de plâtre moulés plus vrais que nature si ce n'est leur couleur. Ces assemblages composent des scènes expressionnistes d'une violence inouïe, visible ou sournoise. Je voulais vous prévenir !

    Quelques exemples: "The Pool Hall" (1993. 245,1x250,2x138,4cm) est l'oeuvre qui m'a le plus ébranlée20200926_175014.jpg. La scène est grandeur nature dans un isolement insulaire, méthode chère à ces artistes qui font entrer ainsi de plein pied le spectateur dans l'oeuvre : trois moulages de joueurs de billard dans le suspense du coup à faire. Trois hommes vêtus de cuir noir ou de vêtements souillés évoluant dans un cadre de bistrot fatigué. Visages impassibles, l'un au masque blanc d'hockeyeur - on ne voit pas ses yeux -, un autre portant lunettes noires. Deux ont la tête surmontée de bois de cerf, image de virilité. Un silence las, désabusé, semble régner. Le corps d'une femme, sans tête, est assis, jambes écartées, sur le billard. Et quel est le "coup" ? Vous vous en doutez, mettre la boule dans l'entrejambe de cette femme, scène allégorique où l'indifférence côtoie la violence et le sexisme Choc visuel évidemment et  dénonciation d'autant plus forte que le coup est insoutenable..

    "The Rhinestone Beaver Peep show triptych" 20200926_175110.jpga été réalisée en1978, après la révolution sexuelle, l'utopie d'égalité et le lancement d'Apollo mais dans une Amérique remise en question par la guerre du Vietnam et le gouvernement Nixon. A bien la  regarder cette installation est un rébus qu'il faut prendre le temps de décrypter. La femme nue et bottée que nous voyons ici est assise de face en haut d'un escabeau. Elle est éclairée par deux gros projecteurs comme sur une scène de théâtre. Elle se regarde dans un petit miroir tenu dans la main gauche et son bras droit, coupé, attrape un autre bras dont le doigt la désigne.Ce corps féminin à la brillance assez sensuelle se détache devant un panneau peint comme un rideau de scène et semble issu de la fosse noire derrière elle. En haut à droite, partiellement cachés figurent les yeux d'un animal qui a tout l'air d'épier. Posée comme un objet de prix la femme n'en n'est pas moins montrée du doigt et regardée sournoisement. Que d'hypocrisie !20200926_175512.jpg

    "Useful Art N°1 (chest of drawers& tv)", 1992.Cette commode a beau être jolie, il dégouline sur elle un jus blanc fianteux qui pourrait émaner de ce que représente la télévision, une déjection... Explications inutiles.

    20200926_175052.jpg"Jody, Jody, Jody" (1994, technique mixte, 243,8x274,3x121,9cm), campe un automobiliste dans son confortable véhicule. Il regarde droit devant lui,  ignorant ou semblant ignorer une fillette agrippée au grillage le long de la route, petite chose abandonnée sans doute. Nous ne voyons que la solitude, le chacun pour soi, la violence faite aux enfants comme une banalité dans la société américaine. Kienholz ne juge pas, il constate, nous force à voir en nous impliquant physiquement.

    Certains pourraient trouver ces oeuvres "ringardes", oublieux du contexte du  moment, sans réaliser que l'Amérique n'a pas beaucoup changé et qu'aujourd'hui le sexisme, le racisme, le consumérisme, la vulgarité et la violence sont toujours actuels en ces temps de campagne présidentielle. Saluons le galeriste de nous rappeler la clairvoyance des époux Kienholz, artistes engagés et véritables visionnaires.

    Edward et Nancy Kienholz, du 5 septembre au 31 octobre, galerie Templon, 28 rue du Grenier St Lazare 75003, Paris. Tel: 01 85 76 55 55. Du mardi au samedi.

     

     

                 

                                   

  • La collection d'un poète ( par Sylvie).

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    La galerie ETC a ouvert ses portes en 2018. L'exposition en cours aujourd'hui, programmée jusqu'au 20 septembre, est un hommage à Maurice Benhamou, décédé à 90 ans en décembre 2019, père du collectionneur Pierre-Henri Benhamou et grand père du galeriste Thomas Benhamou. Le nom d'ETC résume fort bien la filiation qui unit les 3 générations d'amateurs d'art dans la continuité d'un même goût pour la peinture contemporaine, sous influence Zen, minimaliste, sensible et dominée par une absence du Moi.

    Rappelons que Maurice fut un grand découvreur de talents, critique d'art et poète....L'écouter parler des artistes était passionnant et sa plume a beaucoup fait pour expliquer, faire sentir, comprendre les grands mystères qui se cachent derrière des oeuvres que beaucoup qualifient de difficiles d'accès. Citons, par exemple "L'espace plastique", ed Name, 1999, et, aux éditions L'Harmattan "Le visible et l'imprévisible", 2006, "De la peinture à proprement parlé", 2011...et, bien sûr "La trace du vent",  2004, qui sert de titre à cette exposition représentant une partie de la collection personnelle de Maurice Benhamou. Pour le plaisir, j'en citerai quelques unes.

    Photo Degottex.jpgTrès curieusement, en entrant dans la galerie, l'oeil est attiré par une petite sculpture multicolore trônant au centre de la pièce, sur une sellette. Elle a tout d'une sphère armillaire, symbole de l'univers, dont les anneaux sont en métal peint de différentes couleurs. Oeuvre de l'artiste américain Dennis Oppenheim, invité dans les années 80 par la ville de Thiers, ville de la coutellerie, au Symposium international de sculpture monumentale métallique, elle figurait sur le bureau de Maurice Benhamou, tel un objet familier représentatif de son ouverture sur le monde.

    Du grand tableau de Jean Degottex,  à droite, Lignes-report III, (acrylique et colle sur toile, 205x420cm)1977 (photo 1) qui figurait lui aussi dans le bureau de Maurice -  on ne voit tout d'abord que la couleur, le noir - comme un infini démesuré - et la verticalité des trois panneaux qui forment une sorte de triptyque, puis la multitude de lignes horizontales. Rien d'autre que cette trame devenue texte, dépouillement absolu, aboutissement d'un long travail dont l'artiste lui même dira en 1987, résumant son parcours: " Du signe, je suis passé à l'écriture, de l'écriture à la ligne d'écriture, de la ligne d'écriture à la ligne", mais toujours avec la même précision, la fulgurance du geste, devenues ici pliage, arrachage au coeur de la matière, ainsi exaltée. Car tout participe de l'oeuvre, les lignes tracées en report, reliefs et creux, les taches, les déchirures, les infimes accidents, autant de phénomènes nés de l'intelligence des matériaux auxquels Degottex était attentif, évacuant toute marque de sa présence. Il ira jusqu'à délaisser la peinture traditionnelle au profit d'un découpage de la toile, de la brique et du bois. Une réalité arpentée et transfigurée, ici à la fois tragique et sereine.

    Casadesus.20200520_154827(4).jpgComme Degottex, Béatrice Casadesus s'est trouvé des affinités avec l'extrême orient où elle a séjourné. Ce Printemps, (huile sur toile 100x100cm), 2008, (photo 2) est comme une fenêtre sur l'univers, profond, léger, fragile et vaporeux d'où émergent et s'éparpillent des bulles colorées comme des taches de soleil. Seurat l'avait perçu, Casadesus a trouvé dans ces pastilles à trame semi- transparente, qui sont devenues sa marque de fabrique, un symbole du mouvement du monde, ses vibrations. Architecte de formation, elle sait la puissance créatrice de la lumière, son pouvoir générateur de couleurs, de nuances, qui donne une vision fugitive des choses. Comme s'il n'y avait pas de sujet mais seulement des illusions.

    Sous les noirs secoués de quelque sismographe qui rythment l'oeuvre de Claude 20200520_154950(1).jpgChaussard - dessin d'approche n°9, (gouache et trait de craie, 152x56cm), 1981, (photo 3) se faufile une ligne bleue, comme un instant furtif, aléatoire.. Elle est à peine visible mais elle grimpe, éphémère, imprévisible. Chaussard, lui aussi architecte, déploie une rigueur et une extême sensibilité, il aime s'effacer dans la neutralité des blancs, en pigments à stabilité variable, et dans l'absolu avec le bleu en liserets énergiques. Véritable "aventure intérieure" proche de celle de Degottex, ce bleu intense n'est pas peint ou tracé, mais projeté selon un rituel très précis: claqué au cordeau de carrier, comme au tir à l'arc et qui se dépose en poudre sèche comme une auréole., un très léger flou, vibrant, qui suggère la vie.  

    20200520_154843.jpgMax Wechsler vient de s'éteindre à l'âge de 95  ans. Né à Berlin et installé en France depuis 1939, il est passé de la figuration initiale au Surréalisme avant de s'orienter vers une abstraction affranchie de toute gestualité subjective. Le papier marouflé Sans titre,(collage sur toile, 120x80cm),  1985 (photo 4) allie la peinture à l'huile, et des éléments typographiques collés en surface.  Etrange processus éminemment matiériste qui aboutit à un champ de lettres ou débris de lettres en relief, aux formes variées, disséminées sur un fond aux tons sourds. Les aspérités un peu volcaniques nées de cette accumulation dansent sur le velouté de la couleur. Tableau sans bord ni centre, de format modeste contrairement aux dernières toiles de l'artiste, texte illisible qui renvoie à la culture, à l'histoire indicible, à celle, personnelle et familiale de Wechsler. Des lettres qui signifient "silence, solitude, ombre et lumière.."

     René Guiffrey revendique le qualificatif d'artiste plasticien. S'il oeuvre tojours dans la peinture-peinture, il travaille de longue date avec le papier ou le verre, choix délibéré de transparence ou de blancheur parce que le propGuiffrey.20200520_154708(1).jpgre du blanc, comme la musique, c'est le silence, la neutralité, l'inachevé. Page 181 B, émail, acrylique, miroir sur plaque de verre, 70x70cm, 1994 (photo 5) n'y échappe pas. Elle allie le sensible de la main et l'insensible industriel, le poids du verre et sa fragilité, le brillant et le mat, le terne et le miroitant, autant de données qui font de l'oeuvre tout le contraire d'un tableau immobile que le regardeur perçoit d'autant mieux qu'il se déplace. Dans le format carré, presque austère, l'oeil chemine, se perd dans la profondeur des superpositions et l'instabilité des lignes et reflets qui font vaciller les formes: oeuvre toujours en devenir dont la vie semble monter d'une substance enfouie, comme la germination des lettres chez Wechsler.

     

    La trace du vent, galerie ETC,  28 rue Saint Claude, 75003 Paris. Jusqu'au 20 septembre 2020.

     

  • Tacita Dean et Julie Mehretu (par Sylvie)

    Deux plasticiennes amies de longue date ont travaillé de concert pour une exposition en l'honneur des 90 ans de Marian Goodman qui les accueille dans sa galerie parisienne et présente leurs créations personnelles et leurs oeuvres à 4 mains réalisées spécialement en 2018 pour cette occasion. Tacita Dean est née en Grande Bretagne en 1965, Julie Mehretu, américaine, est née en Ethiopie en 1970. Au premier abord leur point commun ne saute pas aux yeux mais une vraie poésie se dégage de leur travail et la mise en place comparative permet d'apprécier leurs différences.

    20180608_182420.jpgAu rez de chaussée, l'oeuvre de Julie Mehretu, A Love  Supreme, encre et acrylique sur toile (228,6x457,2cm) est si monumentale qu'elle polarise le regard. Dans cette superposition de transparences entre figuration et abstraction, s'enchevêtrent et tourbillonnent des traits énergiques, des formes et des couleurs sur un fond pâle. A scruter cet univers pour en chercher le sens, on devine, en haut au centre,  le tracé du seul élément figuratif, un buste plutôt masculin. Il n'explique rien, semble-t'il. L'oeil est charmé, happé par la légèreté de l'ensemble, le côté flottant des éléments purement graphiques et les couleurs douces qui rappellent les images virtuelles. Espace, mouvement suscitent le rêve.

    20180608_182323-1.jpg20180608_182233-1.jpgEn face sont accrochés 9 petits tableaux figurant des temps d'éclipse solaire, Suite of Nine, gouache, fusain et chaux vaporisée sur ardoise, un travail en noir et blanc, éblouissant comme l'est une éclipse dans sa réalité. Et d'une sublime tranquillité. Dans ce processus cyclique Tacita Dean met le doigt sur la fugacité du phénomène naturel, comme une  métaphore du changement et de la permanence. Cette artiste s'est toujours beaucoup intéressée au cinéma et à la photo pour montrer le mouvement ou les subtiles changements d'atmosphère et de lumière. Ici, deviennent presque tactiles les variations de valeurs du ciel et les infimes et mystérieux défauts inscrits sur le soleil noir.        

    Le rapprochement le plus évident entre ces deux artistes est leur pouvoir de mettre l'imaginaire en action.   

    20180608_183217.jpgDans la grande salle du bas sont exposés 90 monotypes Monotype Melody  (procédé d'impression sans gravure qui produit un tirage unique), 45 chacune, accrochés, dispersés tout autour, à la manière  des expositions d'autrefois. Pour Tacita Dean il s'agit de cartes postales anciennes, donc des petits formats, souvent humoristiques et légendées  qu'elle a retravaillées à la couleur, en taches ou en coulures d'encre d'imprimante. De près, elles rappellent certains travaux de Max Ernst ou les collages de Schwitters et transforment la réalité  en transcendance.

    20180608_183302-1.jpg20180608_183023-1.jpgDominant cet univers presque intime, les monotypes de Julie Mehretu en noir et blanc font ici presque figure de coup de poing. Avec leurs lignes écourtées, gigotantes, les taches à l'aérosol, au doigt et à l'encre d'imprimante, elles s'offrent en compositions ébouriffées. Tant de vigueur et de spontanéité tranche avec la méticulosité de Tacita Dean.

    Fulgurance chez l'une, lenteur réfléchie chez l'autre, l'idée de temps parcourt leurs oeuvres qui, toutes imprégnées des médiums de la modernité - couleurs d'imprimante, taches à l''aérosol et au doigt - invitent à l'évasion.

    Tacita Dean Julie Mehretu, galerie Marian Goodman, 79 rue du Temple, 75003 Paris. Jusqu'au 20 juillet.

                 

  • Jean Lissarrague, Poésie et peinture (par Régine)

    P1000524.JPGPour une fois quittons la capitale et regardons vers la province. On oublie trop souvent qu'il s'y passe des évènements culturels remarquables grâce à des organisateurs passionnés et compétents. Un bon exemple en est donné actuellement au Centre Joë Bousquet de Carcassonne.

    Mais qui est Joë Bousquet ? Jeune écrivain, blessé gravement à la moelle épinière pendant la guerre de 1914, il vécut, reclus jusqu'à sa mort en 1950, dans l'hôtel familial qui abrite le Centre créé en sa mémoire. Passionné de peinture et de littérature il reçut dans cette maison et dans sa chambre, que l'on peut voir encore, les plus grands peintres (auxquels il acheta des oeuvres) et écrivains de son temps : Max Ernst, Magritte, Dubuffet, Breton, Eluard et bien d'autres.

    Respectant son esprit le centre consacre une partie importante de son activité aux rapports  poésie-peinture. S'y tient actuellement, et jusqu'à fin février, une exposition consacrée à un éditeur, Jean Lissarrague, et aux éditions qu'il a créée : Les Editions Ecarts.

    L'expositions s'intitule "Jean Lissarrague, les Editions Ecarts, Poésie et peinture, le livre en partage" et c'est bien de cela qu'il s'agit. Cet éditeur de livres de bibliophilie contemporaine (c'est-à-dire de livres tirés à très peu d'exemplaires et réunissant le texte d'un poète et son accompagnement par un artiste) ne force jamais les choses ; il ne sollicite ni un poète ni un artiste pour écrire ou illustrer un texte. Il reste ouvert aux propositions et suggestions et afin que la résonance entre le texte et l'image soit la plus juste possible il privilégie toujours les affinités électives. Ainsi pour la trentaine de livres publiés en 30 ans chaque partenaire souhaitait travailler ensemble. Pas d'idées préconçues non plus quant à la forme du livre ; sa construction doit être au plus près du texte et de l'image. Le livre pour Lissarrague est une totalité, une oeuvre, chaque fois unique.

     Ce sont les artistes avec lesquels il a travaillé qui structurent l'exposition. En accord avec le directeur du Centre, René Piniès, Jean Lissarrague a tenu pour chacun d'eux, non seulement à déployer les ouvrages dans des vitrines mais à exposer parallèlement quelques oeuvres sur les murs. Le lien entre les peintures et les livres devient ainsi évident et démontre, s'il en était besoin, que les livres ne sont pas pour ces artistes une production à part, mais font partie intégrante de leur démarche.

    IMG_5289.JPGL'exposition commence au premier étage et se termine au rez de chaussée. Dans la première salle, avec les trois livres  réalisés avec le peintre Jean Capdeville et les poètes Jacques Dupin et Yves Peyré, sont exposés quatre  tableaux très noirs, très graphiques, très gestuels. D'Alexandre Hollan, deux grands fusains d'arbres et quelques petits formats montrent la proximité avec le livre qu'Yves Bonnefoy a voulu faire avec lui. Enfin quelques oeuvres légères et raffinées de René Laubiès accompagnent les lithographies exécutées pour le texte de Bernard Noël "La Fable et le vent".

    IMG_5308.JPGDans la salle suivante le grand mur du fond est entièrement occupé par trois splendides quasi monochromes et deux diptyques de Frédéric Benrath, hommage rendu à l'artiste ami, décédé l'an dernier. La correspondance entre la profondeur, la subtilité de ces peintures et les gravures ou peintures qu'il a réalisées pour les différents ouvrages déployés dans les vitrines est évidente. Ainsi en est-il pour "Le voyage aux Iles des vestiges" que Michel Butor a écrit à partir de ses gravures, pour "Dans l'attente" de Louis Dire et d'autres encore.

    IMG_5318.JPGLui font face des  gravures de Zao Wou Ki dont les livres fait avec Claude Roy et François Cheng s'étalent dans la vitrine qui jouxte celle consacrée à Frédéric Benrath. Le déploiement de cinq essais d'une des gravures permet de suivre le cheminement de l'artiste jusqu'à son aboutissement.

    Sur la lancée du livre qu'elle venait de terminer avec Michel Deguy, dernière production des Editions Ecarts, à juste titre intitulé "Danaë dans le lit", Béatrice Casadesus a peint un triptyque et un papier. On y retrouve l'accord vibrant du bleu et de l'or qui font la splendeur de l'ouvrage.

    Sur le palier qui mène à l'escalier on redécouvre le premier ouvrage paru aux Editions Ecarts en 1976 : "Les Illuminations" d'Arthur Rimbaud illustré par Claude Georges. L'accord entre textes et images est si fort qu'il en est bouleversant. Les quelques oeuvres du peinture accrochées sur les murs permettent de se remémorer la qualité de cet artiste décédé il y a 20 ans et injustement sous estimé.

    IMG_5326.JPGDans la cage d'escalier les femmes détourées de Colette Deblé s'envolent jusqu'à la vitrine où se déploient les cinq livres imaginatifs, colorés, plein de vie qu'elle a réalisés avec Jean Lissarrague et des auteurs tel que Maurice Benhamou, Louis Dire ou le grand poète portugais Eugenio de Andrade.

    Plus loin, quelques ouvrages manuscrits et enluminés à la main par Pierre Fichet ou Florence Lissarrague.

    La dernière salle est consacrée  à la maquette du livre actuellement en cours : "Le sang sourd de la Nuit", texte que Gilbert Lascault a écrit spontanément, saisi par la force de certains dessins de Philippe Hélénon. Cette maquette est une ouverture sur l'avenir : l'aventure d'Ecarts n'est pas close, des livres sont en cours, à venir.

    Jean LISSARRAGUE, Les Editions ECARTS. Poésie et peinture, le livre en partage. Centre Joë Bousquet et son temps - 53 rue de Verdun - 11000 Carcassonne (Tél : 04 68 72 50 83) jusqu'au 28 février. ouvert du mardi au samedi de 9 h à 12 h et de 14 h à 18 h.