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installations et photos

  • Biennale d'art contemporain de Corse ( par Sylvie)

    La période estivale est certes terminée mais la Biennale d'art contemporain de Corse, qui a ouvert ses portes en mai, se tient toujours à Bonifacio jusqu'au 6 novembre.

    Cette heureuse initiative de l'association "De Renava", un groupe de jeunes amis de la région, donne l'occasion de voir des oeuvres, essentiellement d'art vidéo et des nouvelles technologies, d'une quinzaine d'artistes de nationalités diverses. Les thèmes font écho à l'actualité, ses faits et ses sujets de débat, et sont regroupés en "mouvement de la vie", "mouvement du corps", "mouvement de l'esprit", pas toujours très clairs pour les visiteurs.

    Mais pour cette manifestation la ville de Bonifacio a ouvert des lieux patrimoniaux généralement fermés au public. Alors, avant d'aller se restaurer sur le port et contempler les voiliers et les célèbres falaises de craie, visez les hauteurs de la ville et, à pieds si vous êtes en jambes ou en petit train, optez pour l'ascension.

    20220825_163505~2.jpgPremier arrêt, à la minuscule chapelle Saint Roch, toute de blancheur, où se déploie sur un écran une vidéo rouge de mer agitée conçue par Melissa Epaminondi, flots colorés symbolisant les dangers de la mer. La biennale elle même au titre de Rouge Odyssée, est une référence à Ulysse qui, selon Homère, passa par Bonifacio. (photo 1).

    20220825_164628~2.jpg20220825_164500(1).jpgQuelques pas plus haut, un bruit sourd comme le roulement d'une vague se fait entendre. Là, dans le jardin du Bastion, avec en arrière plan les falaises de craie, les hauts murs de la citadelle et les iles Lavezzi, le plasticien britannique Anish Kapoor a installé l'oeuvre la plus emblématique de l'exposition : Descension, véritable trou noir de 3 mètres de diamètre où un liquide sombre tourbillonne et s'enfonce au centre, comme aspiré par un vide. A l'image de la vie ? (2 et 2bis)

    A la Cisterna la fragile graphie de Mat Collishaw 20220825_170009(2).jpgsymbolise l'arbre mythique et poétique de l'Angleterre et porte son nom, Albion, mais preuve de sa difficile préservation, l'artiste l'a encadré de part et d'autres, de piliers pour le soutenir (3).

    La plus grande émotion m'est venue devant le film Le léopard du britannique Isaac Julien projeté dans l'ancien cinéma : c'est une étrange déambulation de migrants à Lampedusa, dans le décor baroque du "Guépard" de Visconti.

    kara-walker__darkytown-rebellion_2001_aware_women-artists_ar.jpgSurprises à la caserne Montlaur, haut lieu de la légion étrangère, aujourd'hui désafecté. L'américaine Kara Walker, au sujet de la création de l'Africain/Américain, fait défiler, comme dans les livres d'enfant, des images dessinées en noir et blanc en  ombres chinoises sur les thèmes hautement féministes de l'exploitation, de l'esclavage, de la domination des 20220825_180129(1).jpgcorps. (4) Et le chinois Mao Tao, dans son installation Fishing the moon interroge le visible et conduit notre oeil au fond d'un couloir vers une lune noire, changeante, tandis que sont diffusées les fréquences émises par la terre et l'esprit humain en méditation.(5)

    Le spectaculaire écrin de bois, en pin corse laricio, réputé pour être parfaitement droit, et qui a été choisi comme matériau d'introduction à chaque oeuvre de la biennale, abrite,  à l'impluvium, celle, bien connue, de l'artiste corse Ange Leccia la mer, une vidéo géante 20220825_181049(5).jpgqui place le spectateur devant le mouvement constant des 20220825_181314.jpgvagues, à la fois souple et violent, vibrant et effervescent, superbe et menaçant. Elle implique perception et mémoire. Si elle rappelle le rendu des peintres impressionnistes, elle nous ramène surtout vers le dérèglement climatique d'aujourd'hui . (6 et 6bis).

    Ces oeuvres et bien d'autres qui ne sont pas citées ici, toutes plus ou moins hypnotiques, nous questionnent sur l'état du monde et notre capacité à l'exprimer avec de nouveaux outils.

    Rouge Odyssée, biennale internationale d'art contemporain, Bonifacio, jusqu'au 6 novembre, du mercredi au samedi de 16h à 21h.

     

     

  • Nils Udo (par Sylvie).

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    Pour avoir confondu Varengeville sur la côte d'Opâle et Saint Pierre de Varengeville, près de Rouen, j'ai failli manquer l'exposition Nils Udo qui se tient jusqu'à la fin de juin au Centre d'art contemporain de la Matmut, en Normandie, juste prolongement des inoubliables jardins de Vasterival et du bois des Moutiers à Varengeville sur mer.

    Nils Udo n'est pas un inconnu et nous en avons, ici même déjà parlé en 2008 et en 2014, emballées par les installations de cet artiste né en Bavière en 1937, vivant à Paris depuis 1960, à la tête du mouvement "Art in nature", dérivé du "Land art" anglo-américain. L'exposition de Saint Pierre de Varengeville ne nous a pas ménagé de surprises nous qui connaissons son travail mais elle force à reconsidérer la beauté de la nature, l'immense variété de ses composants, formes et couleurs, sa fragilité et le talent de l'artiste à la magnifier, en signifier toute la poésie et nous convaincre de la préserver. Nils Udo intervient dans le paysage, guidé par le génie des lieux. Il arpente le monde puis travaille in situ, avec l'eau, la terre,  la végétation collectées sur place et qu'il ordonne méticuleusement, ajoutant merveilleux et mystère à la perfection spontanée et déjà extrêmement sophistiquée de la nature. Afin de perpétrer ces compositions, pour la plupart éphémères, il les photographie et les tire en grand format, fixant pour l'éternité l'instant de grâce avant son éparpillement.

    NILS-UDO,_Maison_d%e2%80%99eau_I,_troncs_d%e2%80%99%c3%a9pic%c3%a9a,_branches_de_bouleaux,_osiers,_Mer_du_Nord,_Allemagne,_1982.jpgL'affiche de l'exposition (1) reproduit la photo de la "Maison d'eau" faite de troncs d'épicéas de 10m de haut et de branches de bouleaux attachées avec de l'osier, oeuvre réalisée en Allemagne en 1982. On se croirait dans l'allée majestueuse de quelque invisible demeure. Au fur et à mesure de son avancée, la marée recouvre toute l'installation.

    NILS-UDO,_La_couvée,_marbre,_terre,_forêt,_Fondation_Carmignac,_Ile_de_Porquerolles,_2018.jpgDès l'entrée du château de la Matmut , la photo de "La Couvée" - pigment print 124x160cm, Courtesy galerie Claire Gastaud (2) - thème récurrent chez Udo depuis les années 70 pour sa symbolique de nid-abri, bouleverse. Cette sculpture, réalisée en 2018, est installée sur l'île de Porquerolles, à la Fondation Carmignac ( voir la note de Régine du 23/07/18). Dans le creux d'une végétation enveloppante se nichent cinq gigantesques oeufs de marbre blanc de Carrare reposant sur un lit de graviers de marbre. Comme souvent chez cet artiste, l'effet gros plan est saisissant mais ne perturbe en rien la perception de la forêt en arrière plan. L'équilibre est parfait. Règne une harmonie fusionnelle et mélancolique dont la beauté plastique évoque la précarité du monde, les cycles biologiques, la nécessité de protéger la nature et de prendre le temps de la regarder.

    20190606_150851-1.jpg"La mousse I", photo pigment print 156x200cm, 2015 (3). Nils Udo adore le vert, propre même de la nature, la gamme des couleurs intenses et...les portes, des ouvertures vers un au delà de la perception première, dont la profondeur laisse entrevoir la beauté, le sublime. Il a couvert de mousse ce vieux bunker de la guerre de 14, planté des fougères et laissé béante, telle une bouche d'ombre, l'entrée. Sous le velouté énigmatique du bati, la souvenance d'une barbarie.

    NILS-UDO,_Peiture_1175,_huile_sur_toile,_168_x_175_cm,_2015.jpg20190606_145859.jpgUdo a d'abord été peintre. Depuis 2005 il y est revenu. De ses longues marches il transcrit la densité du paysage, la profondeur des bois, les silhouettes des troncs et les jeux de lumière. La "Peinture 1175 de 2015, huile sur toile 168x175cm (4) est caractéristique d'une certaine vision de l'environnement aux contrastes violents où resplendissent en un bouquet, les couleurs intenses d'un feuillage automnal en aplats, cernes et formes simplifiées. Rappel des paysages synthétiques de Maurice Denis et ce que Gauguin appelait "l'équivalent coloré". Même traits appuyés dans "Mijet" de 2014, huile sur toile 110x190cm (5), où les troncs minces et sombres, donnés en contre-jour, laissent voir dans la profondeur une éblouissante palette de couleurs. Effets graphiques proches des mangas qui ajoutent un aspect théâtral à cet hymne à la lumière.

    20190606_145354.jpgNILS-UDO,_Vall%c3%a9e,_2019,_.jpgLe temps a, en partie, couvert de mousse ces vieilles branches d'où émerge un léger et jeune feuillage prometteur. Photo (6), pigment print 138x200, 2003. La nature renait toujours. Dans le triangle de tiges de noisetier posées par l'artiste les petites fleurs blanches d'hortensias s'amassent au coeur de l'arbre . A la recherche de la sève ?  Toute la force du vivant est là qui cliquette au soleil.

    Quelques pas dans le parc de ce chateau du XIXème s'imposent pour voir les nombreuses sculptures et l'installation de Nils Udo "Vallée" modelée autour de l'imposant tilleul (7).

    Exposition Nils Udo, Centre d'Art Contemporain de la Matmut, 425 rue du Chateau, 76480 Saint Pierre de Varengeville. 33 (0)2 35056173. Jusqu'au 30 juin.