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Peinture - Page 7

  • Georg Baselitz ( par Sylvie )

    912227716.2.jpg Baselitz.

     Cette forme compacte, à gauche, faite de larges taches de couleurs gaies, brouillonnes, au centre de la gigantesque toile blanche, c’est un coup de poing, une tornade emportée dans un mouvement circulaire.  Il est surmonté d’un motif  de lignes noires entrecroisées, bordées de couleurs primaires, droit sorti d’un tableau de Mondrian. Curieux mélange ! Et puis on voit des jambes, à l’envers.

     Le titre de la série le confirme, il s'agit de l’image d'un couple. En penchant la tête - ce qui devrait faire se dresser les cheveux de l'artiste - aucun doute, la scène représente une femme, rose et jaune, nue, peut-être, sur un fond vert , assise sur les genoux d'un homme vêtu de bleu. Chaussés, chapeautés, un peu clownesques, ils évoquent plus la luxure que la tendresse.  Il y a une fulgurance dans les traces de pinceau en tous sens et les traits griffés qui rappelle l’expressionniste abstrait William de Kooning et ses « women »  des années 50.

    Des personnages la tête en bas, peu de peintres se sont faits une marque de fabrique de cette façon de faire. C'est du Baselitz ! Pied de nez au spectateur,  mépris pour la nature humaine ou difficulté graphique à camper debout nos carcasses de bipèdes ? La question peut se poser devant les toiles de cet artiste allemand né en 1938 exposées à  la galerie Thaddaeus Ropac, à Paris.

    Pourquoi le retournement ? C’est une vieille histoire. Baselitz a pris le parti d'inverser ses motifs à la fin des années 60 en réponse à une interrogation sur la représentation du réel et  la pratique picturale. S’ensuit évidemment un double dérangement: dérangement devant cette mauvaise facture, une peinture à toute vitesse d’une représentation grossière; dérangement face à ce quelque chose de reconnu sans l'être exactement, le sujet,  mais vidé de son sens du fait de l’inversion avec pourtant l’effet tragique du miroir. Je rapprocherais volontiers cette oeuvre de celle, intitulée « souvenir de la galerie des Glaces » peinte dans les années 20 par un autre allemand, Otto Dix, expressionniste de la Nouvelle Objectivité : même  représentation cynique d’une société pourrie, même effet miroir.

    Pour ses 70 ans, Baselitz ne se renie pas. Ce motif du couple il l’a déjà traité (d'où le nom de "Remix" de l'exposition). Il lui donne ici une nouvelle résonance. Représentation et abstraction y chahutent de façon d'autant plus troublante que s’ajoute la référence à la  gaîté géométrique de Mondrian, un artiste attaché à l’utopie d’une société future parfaitement équilibrée. Seulement voilà, les jambes  sont suspendues comme de la viande et  la grille noire, tronquée, réduite à l’état de crocs de boucher, figure une croix gammée. Décidément cette génération de peintres allemands a du mal à surmonter son passé.

    Georg Baselitz "Remix", galerie Thaddaeus Ropac, 7 rue Debelleyme, 75003. Paris. Du mardi au samedi de 14 à 19h. Jusqu'au 29 mars 2008. 

     

  • Les transparences de Desgrandchamps(par Sylvie)

    8307e6371151c7e83e2757d4a6c9ea4e.jpgAvis aux amateurs de fantômes: une étrange atmosphère règne dans les tableaux de Marc Desgrandchamps. L'oeil y cherche en vain un nom à mettre sur ces non-lieux et ces non-figures, une situation précise à identifier, une histoire à interpréter. Sont-ce des apparitions ou des disparitions?

    Quoiqu'il en soit, un vrai plaisir est là dans la fraicheur des couleurs où les bleus intenses et les verts dominent; dans la légèreté "aquarellique"du médium huile, particulièrement fluide, fait de pigments dilués. Des formes indéterminées se superposent sans heurts. L' espace est ouvert, on respire. Les images parlent de la vie quotidienne, banale, sous un soleil toujours latent. Des silhouettes humaines, souvent tirées de photos, évoluent dans la nature ou le bâti - la plage, la cité -  entrainant le regard dans leur mouvement comme dans un film. Cà et là des indices comme des bribes de souvenirs précis teintés de mélancolie: une tong, un visage en casquette et lunettes noires..C'est un peu pop.

    La vision frontale de cette jeune personne toute en rondeurs sensuelles (photo), à la démarche alerte, créé une dynamique dans l'univers rigide urbain dont la composition structure le tableau. La transparence du vêtement, en surimpression, donne à sentir tout à la fois sa propre légèreté,  mais aussi l'épaisseur de la chair et la géométrie du paysage dont ils sont traversés, en l'adoucissant. Quel étonnant condensé de vie. L'artiste introduit des "dégoulinures" de peinture qui floutent certains contours. Etres et choses en acquièrent une improbable matérialité comme si notre vision se brouillait.  Selon l'humeur, un malaise peut naître devant ces spectres déliquescents dans un bleu tranchant, hors limite qui rappelle la solitude de certaines peintures surréalistes.

    A voir absolument la vidéo qui accompagne l'exposition, pour mieux comprendre le travail de Desgrandchamps. 

     Marc Desgrandchamps , à la galerie Zürcher, 56 rue Chapon, 75003, Paris. Du mardi au samedi de 12h à19h, jusqu'au 12 mars 2008.

  • Colette Deblé aux Editions des femmes (par Régine)

    79d73372b7d22d55bb1185cf1ebf3b66.jpgCréées en 1973 dans la foulée de 1968 et de la fondation du MLF, les Editions des Femmes, avec la fermeture, quelques années plus tard, de leur librairie de la rue de l'Odéon, avaient disparues de notre paysage quotidien.4f79e3286b440e178c136f08325fe717.jpg

    Quarante ans plus tard, elles réapparaissent avec éclat, non seulement en ouvrant une librairie au 33 rue Jacob, mais aussi, au n° 35 dans un ancien magasin de Kilims, un splendide espace galerie.

    Pour célébrer ces évènements  Antoinette Fouque, la fondatrice, a demandé à l'artiste Colette  Deblé d'illustrer un agenda pour 2008. Le choix de cette artiste ne pouvait être plus judicieux. En effet, depuis une dizaine d'années Colette Deblé propose une lecture inédite de la représentation de la femme dans l'histoire de l'art ; d'une scène peinte, sculptée ou photographiée, elle en isole l'image et se l'approprie en en redessinant le contour au crayon ou à l'encre de Chine et en la colorant d'une gamme délicate de lavis d'encres diluées. Avec l'acuité d'une enthomologiste, elle a l'art de saisir, avec la pointe de son crayon, la spécificité de chacune d'elle. Les quelques 200 lavis qu'elle a exécutés pour cette entreprise sont exposés là et c'est un enchantement.

    Une farandole de femmes aux visages et aux  attitudes d'une infinie variété, et dont les membres tronqués ou les évidemments internes rappellent les statues antiques ou les marionnettes d'Asie, nous communiquent leur vitalité.

    Les bleux, les verts, les rouilles, les jaunes, les pourpres, toute une palette de teintes légères et rompues se fondent les unes dans les autres pour notre plus grand plaisir, par la grâce du lavis. De Duras à Sapho, d'Isadora Duncan à Diane ou de Marie Curie à Sainte Cécile ou Simone de Beauvoir et bien d'autres ces portraits semblent flotter dans un univers semé de taches de couleur comme autant de constellations.

    L'exposition respecte l'organisation de l'agenda : elle commence par les femmes qui illustrent le mois de janvier pour se terminer par celles qui illustrent le mois de décembre.

     C'est ainsi que nous sommes accueillis par une Ste Lucie (photo 1), extraite d'un tableau d'Oldoni ; les couleurs des longs plis mouvants de sa robe semblent évoluer sous nos yeux. Un portrait de Sapho (photo 2) qui porte à sa bouche une flute à la fois présente et absente, puisqu'elle est faite d'une réserve de blanc dans l'harmonie colorée du vêtement et du visage, clot cette galerie de portraits.

    Toutes ces femmes passent sur les pages de l'agenda, évanescentes, rendues parfois à la force de leur personnalité par des citations en bas de pages.

    C'est beau, tonique et réjouissant. 

    Espace galerie des Editions des Femmes - 35 rue Jacob, 75006-Paris du 14 décembre au 15 février, de 11 h à 19 h. du mardi au samedi.

  • Viallat joue la Poste (par Sylvie)

    09c43b01096a96492232e5ae4cd851eb.jpgDu dehors il ne fait pas rêver ce musée de la Poste, face à la gare Montparnasse. Et se voir obligée d'en traverser les salles de collections - préjugées forcément poussiéreuses - pour accéder à l'exposition temporaire, voilà de quoi faire tourner l'humeur au vinaigre.

    Et bien, battons notre coulpe pour cette réaction à fleur de peau, ce fut fort intéressant, un endroi éducatif, présenté de façon attachante, où mener les enfants en cette période de vacances : s'y trouve retracée l'histoire du transport du message écrit. Les attelages, les pataches (bateux fluviaux), les malles-postes, les uniformes, les boites aux lettres, jusqu'aux guichets des années 50 et l'invention du télégraphe par Claude Chappe en 1791 ; celle-ci impressionna si fort Alexandre Dumas qu'il l'introduisit dans Le Comte de Monte-Christo...

    Que vient faire là Claude Viallat, direz-vous? Rendant hommage à l'artiste, le musée de la Poste lui a commandé un timbre émis en juin 2006. La maquette de ce timbre rose vif et vert côtoie ici une vingtaine d'oeuvres à l'acrylique sur sacs postaux : c'est une heureuse initiation au travail de cet artiste nîmois, né en 1936, passionné de tauromachie. Un des fondateurs du groupe Support-Surface à la fin des années 60, il est resté attaché à la remise en cause des matériaux traditionnels de la peinture, jusqu'au support brut, libre, sans chassis.

    Fini le sujet unique centré habituel au timbre poste. Avec Viallat, le motif neutre (haricot, osselet?) et répété qui caractérise son oeuvre devient sur le support-timbre un semis. Dépourvu de la bordure blanche, crantée, traditionnelle, il flotte dans un espace sans limite. Et les couleurs, toniques et subtiles, comme toutes celles de la série d'oeuvres ici présentes, ont un éclat, une douceur, une densité, d'une grande puissance décorative. Leur difusion dans la  matière textile en exalte la sensualité. Le rose profond du timbre est né de son support, une cape de torero!

    Musée de le Poste, 34 bd de Vaugirard, 75015. Paris. 01 42 79 24 24. Du lundi au samedi de 10h à 18h (fermé dimanche et jours fériés). Viallat, jusqu'au 22 février 2008.

  • Kirkeby (par Sylvie)

    b459e9478a660af7ed9fc35c0b20851c.jpgFigure majeure de l'art contemporain scandinave, mais assez méconnu du grand public français, Per Kerkeby est exposé à la Galerie Vidal St Phalle à Paris jusqu'au 22 décembre.

    De grandes toiles presque toutes de format carré (122 x 122 cm) d'un artiste contemplatif et tourmenté, à la formation de géologue. Par ces temps de grisaille propre aux plaisirs casaniers, sa peinture, toute minérale, transmet avec puissance et sensualité un désir de nature dont on aurait tor339bf95ad4bf6521634e80ca26f29e08.jpgt de se priver en attendant le printemps.

    Des couleurs terreuses, des espaces souvent divisés comme un puzzle, de multiples strates donnent corps et énergie aux éléments figurés et font percevoir une sorte d'humus nourricier sans que notre oeil ne voit véritablement ici la forêt, là les champs ou les rochers. Figuratif ou abstrait ? allez savoir.

    Un coup de chapeau à la toile ici reproduite : "sans titre", 2004. Du fond noir sur rouge qui laisse apparaître les veines du support en masonite, s'élèvent en rangs serrés des filaments verticaux, ponctués au pastel gras d'outremer et de véronèse et couronnés de taches étincelantes. Pourrissement, germination, on est au coeur du renouvellement de la vie 

     Galerie Vidal St Phalle - 10 rue du Trésor, 75004 Paris. Du mardi au samedi, de 14h à 19h.

  • Hommage à Frédéric Benrath (par Régine)

    e38bb2a414f03650cbb2bc4ce2da9288.jpg366e96be9e572519a8da65875ddff6f2.jpgLe peintre Frédéric BENRATH, renversé par une moto début février, est mort à l'hôpital après deux mois de souffrances physiques et morales. A l'occasion de la donation d'une de ses oeuvres, le Musée de Lyon a tenu à le célébrer par une exposition qui se tient jusqu'au 28 janvier dans la salle 200 du Musée et par une soirée hommage qui a eu lieu le samedi 27 octobre.

    Près de 200 personnes, venues de toute la France, avaient voulu être présentes ce soir là en gage de leur admiration pour son oeuvre et de l'attachement à sa personne. L'exposition n'est pas très grande - une douzaine de tableaux choisis avec perspicacité, et quelques aquarelles - mais elle est magnifique. Elle s'ouvre par une toile de 1963 intitulée "Hommage à Gaspard David Friedrich", rappelant dès l'entrée l'attachement de Benrath au romantisme allemand. Elle se poursuit par des oeuvres récentes, échos au superbe triptyque "Le noir de l'étoile" qui a fait l'objet d'une donation au musée. Aux bleux profonds de ce triptyque, d'où sourd une lumière inattendue que l'on retrouve dans la série des "Bougés" ou dans le diptyque "Entre deux détonations d'abîme", répondent des toiles où se dissolvent les jaunes, les roses et les verts". "Il y a un au-delà de la couleur, disait-il, qui rend unique son intensité, sa vibration, sa charge émotionnelle et sa terrible solitude."

    Dans une vitrine sont présentées pour la première fois un choix de ce qu'il appelait "Mes cartes postales détournées". Dans la reproduction d'un tableau ancien, souvent à un endroit imprévu, il introduisait une partie d'une de ses propres oeuvres. Elles montrent avec humour, le lien qu'il entretenait avec la peinture classique.

    Des aquarelles illustrent la vivacité de son geste et la richesse de sa palette. 

    La préoccupation essentielle de ce travail sur la couleur et la lumière qui sous-tend toute son oeuvre et lui donne cette formidable homogénéité, est non pas la recherche d'un équilibre entre l'ombre et la lumière mais celui de leur incessant affrontement. Il est temps de reconnaître que parmi les peintres abstraits de sa génération, cet artiste occupe une place extrêmement originale.

    La soirée d'hommage s'est poursuivie dans l'auditorium du Musée par la projection d'un film sur l'artiste, un concert donné par trois musiciens de l'Ensemble intercontemporain dont il était un familier, et par la lecture de textes de poètes qui l'avaient bien connu (Michel Butor, Bernard Noël, Sylvie Fabre G.).

    Ce fut une soirée exceptionnelle consacrée à un homme qui ne l'était pas moins.

     Musée des Beaux Arts de Lyon, 20 place des Terreaux. Tel 04 72 10 17 40. Ouvert tous les jours, sauf mardi et jours fériés de 10 h à 18 h. Vendredi de 10 h 30 à 18 h

     

  • Encore et toujours Tal Coat

    Si les oeuvres de Tal Coat vous saisissent comme nous d'un enchantement irrésistible, courrez à la Galerie de Michèle et Odile Aittouarès, (29 rue de Seine, 75006-Paris) voir une exposition consacré à cet artiste jusqu'au 27 octobre.

    cfc24bfba2fe39bcd52bb6cf308c0cd1.jpgLes quelques oeuvres exposées montrent avec perspicacité la quête que cet artiste a poursuivi toute sa vie pour saisir toujours au plus prêt, et de plus en plus abstraitement, le mystère de la nature. En voici deux exemples :

    La toile dénommée "silex", ici reproduite, date de 1958. Des éclats de pierres noires et brillantes apparaissent tandis que d'autres disparaissent laissant une trace plus claire. Ils sont immergés dans un espace beige, lumineux et légèrement crémeux. Tout est donné à la fois : la terre, la pierre, la lumière. En ne soustrayant pas la pierre à son milieu, Tal Coat montre que cette masse de cailloux est imprégnée par l'espace qui l'entoure. Pour lui l'objet et son environnement n'existent que l'un par rapport à l'autre. Les isoler par une forme définie est pour lui un contre sens et le contour une frontière que, tout au long de son oeuvre, il cherchera à effacer. L'espace est un milieu qui donne aux choses leur existence.

    Un autre exemple de sa démarche est donné par une toile plus récente, entièrement jaune. En son centre trois ronds légèrement en relief affleurent. Plus question ici de figure, de fond, mais de structure, de milieu, d'un espace où les choses peuvent se mouvoir. Si on prend le temps de regarder un peu longuement ce tableau, on le voit évoluer sous nos yeux, une ombre transparaît sous le jaune. Le tableau, bien que monochrome, est comme le monde une activité. Tal Coat peint des énergies en mouvement dans la nature.

    Dans la deuxième salle de la galerie, au delà de la petite cour, sont exposées quelques aquarelles, merveilleuses de fraîcheur. Cette technique exigeant une exécution immédiate, ne souffrant pas de reprise, lui permettait de rendre compte de ce qu'il y a de plus fugace, de plus fragile dans la nature : une lumière changeante, une ombre sur un champ, la venue de l'orage.

    GALERIE BERTHET-AITOUARES - 29 rue de Seine, 75006-Paris. Ouvert du mardi au samedi de 11 h à 13 h et de 14 h 30 à 19 h

     

  • Miquel Barcelo, la matière des profondeurs marines.

    132846ee0c6e12c0a791471de4b3b94c.jpgIl est encore temps, mais faites vite: Miquel Barcelo, peintre espagnol né à Majorque en 1957, nourri d'art brut, expose pour quelques jours encore à la galerie Yvon Lambert, à Paris.

    Des sculptures mais surtout des toiles, de grand format, ayant pour thématique les fonds marins - normal pour un insulaire -, l'eau et ce qui s'y dépose, y repose; un espace dense et charnel de substances et d'objets hétéroclites et nonchalants, entre endormissement. métamorphose, abandon ou disparition.

    Ici des crânes et des allumettes; là dans l"Encéphalogramme de la mer" ( 200x300 cm, 2005 ) méduses et algues envahissent la toile d'un blanc opaque.à peine teinté d'un bleu sous-jaçant. Sa saisissante texture, épaisse, fibreuse, tourmentée, née d'un maillage contrecollé mêlé à la peinture, s'éffiloche, se rétracte. Elle rappelle l'oeuvre d'un autre "grand" d'Espagne Antoni Tapiès. Y apparaissent, dans une sorte de trouble, les multiples plis et replis de ces figurants et les orifices noirs et ovoïdes de coquillages béants. D'un travail au trait, horizontal ou vertical, parfois même en zig-zag, surgit la mouvance des flux aquatiques et sableux... comme un encéphalogramme frémissant.

    Miquel Barcelo, galerie Yvon Lambert, 108 rue Vieille du Temple, 75003. Paris.  Jusqu'au 26 mai.  Attention, la galerie ferme de 13h à 14h30.

  • Arschile Gorky

    medium_Gorky.jpg"Journal d'un séducteur" de Arschile Gorky, 1945

    Dans le cadre de l'année sur l'Arménie se tient, jusqu'au 2 juin, au Centre Pompidou, une petite exposition Arschile Gorky. Y sont accrochés des dessins et quelques tableaux magnifiques. L'un d'eux, "Journal d'un séducteur" a particulièrement retenu mon attention. Différent des autres oeuvres présentées, lesquelles, rythmées, colorées, sont en résonance directe avec "L'arc noir" de Kandinsky accroché en face, dans le couloir central du Musée, son titre m'a paru en contradiction totale avec l'oeuvre elle-même.

    "Journal d'un séducteur" est une grande toile (126,7 x 157,5 cm). Une forte impression de désolation en émane. Elle nous met face à un monde calciné, couleur de cendre et un fort sentiment de perte nous saisit. Non le sexe n'est pas gai !

    Sur un fond terreux où le jaune affleure sous le noir et le gris évoluent des formes au contour mal circonscrit. L'action conjointe de la ligne qui permet au regard de circuler et de la couleur qui la déborde empêche toute fermeture des formes sur elles-mêmes ; celles-ci sont le résultat d'un automatisme mental proche des surréalistes.

    Au centre, seul reconnaissable, un visage, mi humain, mi animal, semble contempler l'ampleur eu désastre. Des volutes sortent de son crâne et l'un de ses yeux liquéfié se répand jusqu'à ses lèvres. A sa gauche et sous lui quelques signes très proches de ceux de Miro évoquent des sexes féminins éparpillés. Ce tableau est empreint de toutes les perturbations qui ont affecté l'esprit de l'artiste au cours de sa vie. Il ne les supportera pas et se donnera la mort en 1948.

    Gorky résonne ici, mais à sa façon, aux artistes qu'il a regardé avec fascination : Kandinsky pour l'utilisation de la couleur comme vecteur du monde intérieur et bien sûr Miro. Comme lui il inscrit directement, sans aucun intermédiaire, son monde intérieur sur la toile, comme lui il réduit les objets à des signes métaphoriques renforcés par les vibrations du jaune et d'un peu de rouge.

    Le séducteur n'est paré d'aucune séduction. La mort rode dans son journal. C'est Don Juan avec son impuissance à aimer. Sexe et mort son ici indissolublement liés.

    Arschile Gorky au Centre Pompidou. MNAM, 4ème étage, jusqu'au 2 juin. Cette exposition est à compléter par celle qui se tient jusqu'au 4 juin au Centre Gulbenkian, 51 avenue d'Iéna, 75116.

     

  • Tal Coat dans le IVème

    medium_aquarelle_TC.3.jpgIl avait coutume de dire "Je ne suis pas devant la nature mais dedans". Allez-y, c'est à la galerie Vidal Saint Phalle, à Paris.

    Il est probable que vous aurez, comme nous, le coup de coeur pour la petite aquarelle dont le format, étroit et allongé, évoque l'étendue d'un paysage balayé par le regard.

    Ce minuscule panoramique jaune et gris (11,5 x 27,5) des années 80 est exemplaire de l'écriture poétique de Tal Coat ("Front de bois" en breton, 1905-1985) : un jaune léger, incertain, monte, s'arrête, reprend sous un gris plus dense, réapparaît puis disparaît dans le blanc du papier ; à droite, un ocre velouté s'estompe sous un brouillard en dissolution... La peinture est vivante, faite de surgissements et d'affleurements, un espace mobile où aucune forme n'est fixée mais où la lumière irradie.

    C'est ça la peinture dite "informelle". Elle a marqué les années 50. Trouvez-vous qu'elle a vieilli ? Pas si sûr.

    Galerie Vidal Saint Phalle, 10, rue du Trésor, 75004-Paris. Tél : 01 42 76 06 05. Du mardi au samedi, de 14 h à 19 h.