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Arschile Gorky

medium_Gorky.jpg"Journal d'un séducteur" de Arschile Gorky, 1945

Dans le cadre de l'année sur l'Arménie se tient, jusqu'au 2 juin, au Centre Pompidou, une petite exposition Arschile Gorky. Y sont accrochés des dessins et quelques tableaux magnifiques. L'un d'eux, "Journal d'un séducteur" a particulièrement retenu mon attention. Différent des autres oeuvres présentées, lesquelles, rythmées, colorées, sont en résonance directe avec "L'arc noir" de Kandinsky accroché en face, dans le couloir central du Musée, son titre m'a paru en contradiction totale avec l'oeuvre elle-même.

"Journal d'un séducteur" est une grande toile (126,7 x 157,5 cm). Une forte impression de désolation en émane. Elle nous met face à un monde calciné, couleur de cendre et un fort sentiment de perte nous saisit. Non le sexe n'est pas gai !

Sur un fond terreux où le jaune affleure sous le noir et le gris évoluent des formes au contour mal circonscrit. L'action conjointe de la ligne qui permet au regard de circuler et de la couleur qui la déborde empêche toute fermeture des formes sur elles-mêmes ; celles-ci sont le résultat d'un automatisme mental proche des surréalistes.

Au centre, seul reconnaissable, un visage, mi humain, mi animal, semble contempler l'ampleur eu désastre. Des volutes sortent de son crâne et l'un de ses yeux liquéfié se répand jusqu'à ses lèvres. A sa gauche et sous lui quelques signes très proches de ceux de Miro évoquent des sexes féminins éparpillés. Ce tableau est empreint de toutes les perturbations qui ont affecté l'esprit de l'artiste au cours de sa vie. Il ne les supportera pas et se donnera la mort en 1948.

Gorky résonne ici, mais à sa façon, aux artistes qu'il a regardé avec fascination : Kandinsky pour l'utilisation de la couleur comme vecteur du monde intérieur et bien sûr Miro. Comme lui il inscrit directement, sans aucun intermédiaire, son monde intérieur sur la toile, comme lui il réduit les objets à des signes métaphoriques renforcés par les vibrations du jaune et d'un peu de rouge.

Le séducteur n'est paré d'aucune séduction. La mort rode dans son journal. C'est Don Juan avec son impuissance à aimer. Sexe et mort son ici indissolublement liés.

Arschile Gorky au Centre Pompidou. MNAM, 4ème étage, jusqu'au 2 juin. Cette exposition est à compléter par celle qui se tient jusqu'au 4 juin au Centre Gulbenkian, 51 avenue d'Iéna, 75116.

 

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