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Arnold Schönberg (par Régine)

L'exposition Arnold Schönberg actuellement au Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme (M.A.H.J.) permet, avec près de 300 oeuvres et documents, de découvrir que ce quasi autodidacte de génie ne fut pas seulement un musicien qui, au début du XXème siècle, révolutionna la musique de son temps, mais aussi un inventeur et un peintre. En effet, dès 1908 et jusqu'en 1913, tout en s'affranchissant de la musique tonale pour développer des dissonances qui aboutiront à la musique dodécaphonique puis sérielle, Schönberg peint et produit plusieurs centaine de toiles, aquarelles et dessins dont plusieurs sont montrés ici. Il réalise des oeuvres très personnelles où les portraits et les auto-portraits ont la part belle. Un certain nombre d'entre eux sont présentés ici voisinant ceux que des artistes viennois, ses contemporains, ont fait de lui (Openheimer, Egon Schiele, Richard Gerstl). Deux toiles de Kandinsky, prêtées par le Centre Pompidou et des échanges de courrier témoignent aussi de l'amitié qui, dès 1911 et pour un temps, se noua entre les deux hommes, époque à laquelle Schönberg participa à la première exposition du Blue Reiter à Munich. En opérant de la sorte l'exposition l'inscrit d'emblée dans le contexte artistique viennois de son époque.

Dans la série des "Regards" ici exposés, deux d'entre eux sont particulièrement saisissants (photo 1IMG_3291.JPG et 2)IMG_3318.JPG. Des visages triangulaires dont les yeux mangent la majeure partie émanent d'un fond ocre ; dans l'un un halo rouge entoure des pupilles noires cernant un iris laissé blanc. Dans l'autre le halo est marron foncé, la cornée sombre, la pupille blanche et l'iris rouge. Ces regards semblent au prises avec une vision hallucinée, terrible pour l'un, sauvage pour l'autre. "Je n'ai jamais vu des visages, mais seulement des regards puisque je regarde les êtres dans les yeux. C'est pourquoi je peux reproduire le regard d'un homme. Alors qu'un peintre saisit d'un seul coup d'oeil 'homme en entier, moi je ne peux saisir que son âme" disait-il. Dans cette série il fera aussi son portrait (photo 3)IMG_3316.JPG ; au delà de tout souci de ressemblance, il montre la flamme qui le brûle et son regard qui transperce les apparences.

Suivent, réalisés sur différents supports, des peintures et des dessins oniriques, très expressionnistes, parfois abstraits qui mettent en lumière la qualité singulière de cette production. Dans une aquarelle intitulée "Attente" de 1910IMG_3301.JPG où une forme évanescente perdue dans un univers très sombre se heurte à un mur qui la sépare de la lumière (photo 4), ou encore dans une peinture intitulée "Nocturne" où de lointaines lueurs émergent d'un univers très noir, Schönberg exprime un questionnement spirituel angoissé et peut-être sa terreur du néant.

Une partie de cette exposition est également consacrée à son rapport au judaïsme avec lequel il entretint une relation compliquée. Il se convertit en effet au protestantisme en 1898 mais, meurtri par la vague d'antisémitisme qui ne cesse de déferler, il réintégrera la religion juive en 1933. Son intérêt pour le thèmes bibliques traverse d'ailleurs toute son oeuvre musicale. Dans l'opéra inachevé de 1930 "Moïse et Aaron" dont un film est ici projeté, Schönberg dit les déchirements qui n'ont cessé de le tourmenter et la solitude de l'homme devant le silence de Dieu.

Mais cet homme exceptionnel n'a pas été qu'un théoricien austère et l'exposition nous montre un quotidien où la dimension du jeu tient une place importante. Sont présentés certaines de ses inventions, par exemple un jeu d'échec à quatre joueurs dont il a façonné les pièces (photo 5)IMG_3307.JPG, un jeu de carte où il a redessiné les figurines avec humour et inventivité (photo 6)IMG_3303.JPG. Pédagogue il mit au point un jeu éducatif pour apprendre la musique et fit une maquette pour représenter visuellement la construction de l'un de ses quintettes de 1923 (photo 6)IMG_3308.JPG.

Cette exposition passionnante, révèle les multiples facettes de ce compositeur génial et en montre toute la complexité.

Arnold Schönberg, peintre de l'âme. Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme. Hôtel de St Aignan, 71, rue du Temple, 75003-Paris (Tél : 01 53 01 86 53). Fermé le lundi. Jusqu'au 29 janvier.

 

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