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David SMITH (par Régine)

En 2006 eut lieu au Centre Pompidou une superbe exposition des sculptures de David Smith (sculpteur américain né en 1906 et mort accidentellement en 1965). Depuis cette date aucune de ses oeuvres n'avait été montrée à Paris. Or la Galerie Karsten Greeve expose actuellement une exceptionnelle série de dessins des années 1950/1960 qu'il serait dommage de ne pas voir. Elle nous rappelle que cet artiste ne fut pas seulement un peintre, un très grand sculpteur mais aussi un merveilleux dessinateur.

Le titre de l'exposition "Acting in space" rend parfaitement compte du sentiment éprouvé devant ces dessins car ce qui frappe immédiatement c'est l'extrême vitalité et la liberté avec laquelle ils occupent l'espace. On ressent aussi que la Nature et la présence humaine n'en sont pas évacuées.

En voici quelques exemples :

Dans "Sans titre" de 1952 (photo 1)IMG_0454.JPG, tel un buisson d'épines, un réseau de lignes d'épaisseur variable envahit la surface du papier. Aux points de rencontre de leurs ramifications des taches se forment et s'illuminent en rouge, comme si, tels des synapses, elles étaient le révélateur d'un influx d'énergie sous jacent.

Cette structure figurant la circulation d'une force avec ses points nodaux se retrouve dans plusieurs dessins. Ces lignes en expansion qui dévorent l'espace en s'entrecroisant donnent un fort sentiment d'instantanéité ; David Smith appartient à la génération des expressionnistes abstraits et ces oeuvres entrent forcément en résonance avec certaines peintures de Pollock.

Dans "Sans titre" de 1953 (photo 2)IMG_0459.JPG des lignes très fines, très fluides, ponctuées de quelques taches circulent allègrement et nous invite à entrer dans la danse. Chaque segment semble relié aux autres pour former un rythme dans lequel on se trouve pris. Smith nous offrirait-il les traces d'une chorégraphies ou un ciel avec constellations et ballet d'étoiles filantes ?

L'encre et gouache sur papier de 1954 (photo 3) IMG_0452.JPGest d'une grâce miraculeuse. Telles les baguettes d'un prestidigitateur, des lignes jonglent avec de délicates bulles aux couleurs irisées. L'artiste nous entraîne ici dans un rêve ludique et mélodieux. Ne disait-il pas "Une grande oeuvre d'art abstrait ressemble à un rêve. Elle donne à voir à la fois la beauté et son corolaire l'imagination".

D'autres oeuvres sont très noires, très prégnantes, telle "Sans titre" de 1957 où une forme anthropomorphe noire et puissante jaillit du papier (photo 4)IMG_0467.JPG. Arcboutée sur elle-même, fureur contenue, elle semble prête à bondir. On pense à "L'ange du foyer" de Max Ernst. Si on a beaucoup parlé de l'influence de Gonzalés et de Picasso sur David Smith, il ne faut pas oublier celle des surréalistes dont l'automatisme correspondait à son désir de spontanéité pour exprimer formellement des émotions indicibles.

Les traces d'un noir épais qui maculent le "Sans titre" de 1951 (photo 5)IMG_0465.JPG sont-elles, comme dans certains lavis de Tal Coat, celles d'un troupeau en transhumance, d'un vol de corbeaux dans le ciel ? acting in space...

Une unique sculpture assez plate faite de matériaux agricoles (selle, instruments agraires) est placée au centre de l'exposition (photo 6)IMG_0461.JPG. A-t-on voulu suggérer l'idée d'un dessin dans l'espace, expression souvent utilisée au sujet de son oeuvre comme de celle de Gonzalés ? Nombre de ses sculptures sont en effet peu profondes mais aucune d'entre elles ne saurait être amenée à une version en acier d'un dessin préexistant. Si dessins et sculptures ont des points communs il s'agit bien de deux registres différents. C'est ce que montre à merveille cette exposition.

DAVID SMITH Drawing and sculpture : acting in space - Galerie Karsten Greve - 5, rue Debelleyme, 75003-Paris. 01 42 77 19 37. Jusqu'au 27 juin.

 

 

 

 

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