Art et nature: tous au vert (par Sylvie)
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Le Covid 19 aura eu au moins un avantage en ce printemps 2020. Il a permis à Paris, et sans doute à d'autres villes, de reverdir, comme si la nature avait enfin, subrepticement, la possibilité de reprendre ses droits, d'emboîter le pas des écologistes et de se faire, à nouveau, sujet pour les artistes et les constructeurs. Petit tour d'horizon..
Une nature libérée: - Des herbes folles recouvrent les fameuses grilles aux pieds des arbres (photo 1); une touffe fait craquer le macadam sous sa poussée printanière et s'installe, incongrue comme salade dans l'assiette (2); des rejets feuillus sortent librement d'un tronc (3), l'ancienne ligne de chemin de fer devient tapis vert plein de douceur (4) et la mousse a recouvert depuis quelques années déjà la fontaine de Salon-de-Provence. Tiens, on dirait du Courbet ! (5)

, la tour Occitane à Toulouse (8)
 ou la forêt verticale de l'immeuble de Stefano Boeri à Milan 
(9).
Fabrice Hyber (né en 61) a fait sien le concept d'intelligence des plantes et de leur développement cellulaire. Ses oeuvres sont proliférantes comme des rhisomes qui établissent des liens et des échanges menant à d'autres articulations. Les racines de Pétrole sont emprisonnées dans des pots qui leur permettent de flotter tout en étant coupées du liquide qui les porte. Ce pétrole lourd, sombre, dangereux est donc aussi bénéfique. Voilà l'image même du combat que doit mener la nature, entre mutations, proliférations et hybridations, pour se défendre (10).
Toute a
utre est l'oeuvre de Christian Boltanski (né en 44 ), Animitas (11), du nom de monuments que l'on trouve le long des routes chiliennes en souvenir des accidentés. De fines tiges supportent des clochettes qui sonnent au vent et convoquent avec poésie l'âme des morts. La mémoire et l'obsession à conjurer l'oubli, thèmes essentiels de l'artiste, trouvent leur expression dans ce champ de fleurs légères comme les aigrettes de pissenlit : "je sème à tout vent..".
bati, les carcasses animales, les portraits et les foules. Alors pourquoi ces gros plans en grand format d' Amaryllis en plein drame de la fanaison, toujours peints à la cire ? Parce que les hommes et leurs oeuvres se dégradent avec le temps. Et pourquoi les coeurs d'iris à l'aquarelle de Patrick Neu? (13) Parce qu'au plus profond d'elles-mêmes et de leur beauté sensuelle, insolente et fragile, ces fleurs renvoient à la métaphore de l' humain .
Eva Jospin (née en 75) n'oeuvre pas au pinceau. Elle taille dans le carton et vise la forêt. Une forêt où l'on se perdrait aisément tant elle est dense, ensorcelante, dans laquelle s'entrecoit la putréfaction des plantes, leur décomposition. Elle fait un peu peur, de cette peur que nous avions, enfants, en lisant des contes. Les épaisseurs planes et ternes du médium carton, né du bois, mènent le regard dans des profondeurs mystérieuses, étouffantes que l'homme ne pourra peut-être pas dominer (14).
 Tous deux lui empruntent ses matériaux pour les arranger de façon inédite. Nils Udo ( né en 37) recréé une nature dans le nature et la photographie pour palier à sa fugacité. Ces installations précaires d'une extrême délicatesse révèlent la poésie et la dimension presque divine de cet environnement. Les oeufs de marbre blanc de La couvée mettent en évidence son pouvoir réconfortant et nourricier. On aurait tort de l'oublier(15)
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t bien dire le bouquet de tulipes de Jeff Koons (né en 55) qui s'est imposé dans un jardin parisien ? La réponse viendra peut-être des générations futures. En attendant on se plait à guetter les nouvelles investigations du plasticien argentin Tomàs Saraceno (né en 73) qui nous a surpris et enchantés au Palais de Tokyo par ses recherches sur la vie et les oeuvres des araignées. Le déploiement de leurs fils de soie est une invite à diversifier notre dialogue avec la planète qui compte tant d'autres formes de vie - exemplaires - que la nôtre. La nature n'est pas seulement vegétale..(17).



