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  • Dessin, sculpture, peinture.... (par Régine et Sylvie)

    Après de longues vacances nous éprouvions le besoin de reprendre contact avec Paris. Nous avons donc fait le tour de quelques galeries du Marais et vu le travail d'artistes que nous connaissions peu, mal ou pas du tout. Voici nos impressions.

    Les oeuvres de Hanns Schimansky, présentés à la Galerie Jaeger Bucher pourraient évoquer une sonate au phrasé léger et sautillant. Elles sont simples par leur technique, l'encre, extrêmement élaborées par la graphieGEDC0222.JPG. Cet autodidacte allemand, ingénieur agronome de formation né en 1949, trace sur le papier une multitude de lignes fines et rythmées, à l'allure spontanée, très distinctes malgré leur nombre, et qui s'entrecroisent, se superposent, formant un treillis, une écriture sismographique oublieuse des bords de l'oeuvre et de sa structure, un papier plié dont la trame se laisse deviner.

    On se prend à suivre du regard avec attention les lignes comme si nous étions pris au piège de ce maillage infini GEDC0223.JPG: images abstraites, certes, mais fortes qui disent par leur sobriété fourmillante aussi bien notre univers de trépidations urbaines que des énergies chorégraphiques avec des ponctuations, des lignes appuyées ou effleurées comme des pulsations de coeur ou des rétentions de souffle.

    GEDC0229.JPGDes aplats de couleurs primaires - jaune, rouge, bleu ou noir - géométrisent les surfaces d'autres oeuvres sans toutefois les rendre ascétiques car ils s'inscrivent à certains endroits en coulées ou en taches concentrées dans les interstices des pliures. Loin de déranger, ces imperfections humanisent.

    Galerie Jaeger Bucher - 5-7, rue de Saintonge, 75003-Paris (o1 42 72 60 42), jusqu'au 15 novembre.

     

    Avec des expositions inédites ou spectaculaire la Galerie Karsten Greve a l'art de surprendre. Celle du sculpteur et peintre allemand Norbert Pragenberg en est l'illustration. Sur le sol de la galerie gisent ou se dressent d'énormes jarres GEDC0241.JPGdont la présence physique et la beauté son saisissantes. Montées avec des colombins d'argile superposés qui portent encore l'empreinte des doigts de l'artiste, leur aspect rudimentaire est contredit par leur taille, la gaité de leurs couleurs et les nombreuses excroissances dont elles sont ornées.GEDC0248.JPG Des fleurs par exemple s'y épanouissent ; le trou qui leur tient lieu de coeur transperce la paroi de la jarre la rendant inutilisable. Ainsi transformées en tonneaux des Danaïdes ces jarres perdent leur fonction utilitaire pour s'imposer comme sculpture qui occupent avec force l'espace environnant.

    C'est le rapport physique de l'artiste avec la matière terre qui s'exprime ici. Sa façon de la soumettre, de la façonner, de la magnifier et de l'imposer dans l'espace. Son agilité à modeler l'argile se manifeste différemment dans une troublante petite oeuvre isolée accrochée sur un murGEDC0242.JPG. S'agit-il d'un plat ? Mais non il s'agit bien d'une sculpture car elle est remplie de volutes bleues. Sous ses doigts la céramique devient légère, vaporeuse comme de l'organdi, contrepoint à la lourdeur des oeuvres précédentes.

    Mort en 2012, Norbert Pragenberg était aussi peintre. Deux très belles toiles de lui accompagnent ces sculptures. Quelques bulles de couleur percent un fond d'un noir épais comme les ténèbresGEDC0247.JPG. Telles des planètes elles semblent migrer. Sensation à la fois légère, dense et puissante qui n'est pas étrangère à celle éprouvée devant ses sculptures.

    Galerie Karsten Greve, 5 rue Debelleyme, 75003-Paris (01 42 77 19 37), jusqu'au 11 octobre.

     

     Laurent Grasso

    Voilà un jeune artiste, né en 72, qui ne craint pas les retours en arrière. Il faut voir, à la galerie Perrotin, les petits tableaux sur bois inspirés de Giotto ou d'Uccello ( XIV et XVème siècles) qu'il a fait peindre. Reconnaissons qu'ils sont très beaux, pleins de charme avec leurs couleurs un peu passées, les petits personnages spectateurs ébahis/impuissants devant une nature en révolteGEDC0258.JPG: éboulements, irruptions volcaniques, tremblements de terre sont là pour rappeler Ephèse,Pompeï et bien d'autres cataclysmes.                                           

    Le primitivisme de la facture en accentue le distance dans le temps mais l'introduction de deux disques solairesGEDC0259.JPG, par ailleurs réalisés en laiton et exposés tout près, donne réalité à une très ancienne et inquiétante prophétie de  catastrophe inéluctable lié au pouvoir créateur et destructeur de cet astre. Il engendre un sentiment d'étrangeté et donne à s'interroger sur le visible et l'invérifiable.

    Dans des cadres de bois sombre, certains de ces petits paysages sont accompagnés d'une figurine, par exemple une tête romaine de Bacchus en marbre blanc du IIème siècle, et d'un chiffre en relief de néon, ici 79, date de l'éruption du Vésuve suivie de la destruction de PompeïGEDC0263.JPG. Le tableau montre évidemment les fumées sortant du volcan et envahissant la plaine. Vrai travail d'ethnologue que la réunion de ces trois pièces.

    D'anciennes photos en noir et blanc de foules scrutant le ciel rappellent le "miracle" de Fatima en 1917,GEDC0262.JPG miracle probablement faux basé sur une projection lumineuse réalisée par l'armée.                              

    Grasso questionne la vérité des phénomènes et tend à nous montrer que la perception que nous en avons est un mélange d''histoire, de  science et de croyances, toutes choses étant elles-mêmes sujettes à nouveau regard selon les époques. Alors, pourquoi ne pas s'amuser à faire un peu de science- fiction, détourner les sources, introduire des outils de notre temps (le néon), télescoper les temporalités ? A l'heure des bouleversements météorologiques et des tensions mondiales, l'imagination n'est pas de trop. Laissons nous entrainer par l'artiste dans son désir de figurer l'instant catastrophique sans envisager la répétition des phénomènes.

    Laurent Grasso "Soleil double", galerie Perrotin, 76 rue de Turenne, 75003. Jusqu'au 31 octobre 2014.

     

     Wim Delvoye est un démiurge.  Pour lui rien n'est impossible et sa volonté de soumettre le monde à son désir se manifeste à nouveau dans les oeuvres qu'il expose actuellement dans l'annexe de la Galerie Perrotin, Passage St Claude. Avec sa détermination habituelle de mêler le savoir faire à la plus grande banalité, de détourner des objets usuels en oeuvres d'art spectaculaires, il sculpte sur des valises en métal de fins motifs persansGEDC0268.JPG, découpe des pneus de voiture en dentelle ouvragéesGEDC0270.JPG et tord des roues de bicyclette pour en faire des sortes d'anneaux de MoebiusGEDC0275.JPG. Rien n'est impossible à cet homme qui reconstitua la digestion  humaine avec sa fameuse machine Cloaca et n'hésita pas à tatouer des cochons. Le monde lui appartient et il le modèle au grès de son imagination.

    GEDC0267.JPGOn ne peut cependant réfreiner son admiration devant la sculpture en marbre d'un blanc immaculé qui aimante le regard dès l'entrée dans la galerie. Sa base est celle d'un arbre dont le tronc s'élève en vrillant sur lui-même se transformant en une tour de style gothique flamboyant dont les détails sont, comme à l'accoutumée, poussés à l'extrême. Nature, culture et sacré sont ici intimement liés.

    Galerie Perrotin, 10 Impasse Saint Claude, 75003-Paris, jusqu'au 31 octobre